Daniel Gramme, un herboriste pas comme les autres
Le mot de Daniel Gramme
Pour résumer ma vie d’herboriste, je citerai le sage hindou Rabindranâth Thâtur, dit Tagore : « Je dormais et je rêvais que la vie, n’était que joie. Je me réveillai et je vis que la vie n’était que service. Je servis, et je vis que le service n’était que joie. » Quelle satisfaction de pouvoir aider les gens à vivre mieux
La belle âme de Daniel Gramme
La vie de Daniel Gramme est un roman. Après un parcours de bandit notoire, le Liégeois à découvert, seul dans sa cellule, la diététique, le yoga et la pensée positive. Devenu herboriste, naturopathe, conférencier et écrivain, il est un peu l’âme du quartier populaire de Seraing où sa Boutique Santé, un magasin bio de la première heure, est devenu une petite institution.
Père inconnu, mère tenancière de bar accro aux médicaments… Daniel Gramme n’est pas né sous les meilleurs auspices, le 22 février 1949. De fil en aiguille, il a progressivement sombré dans le petite délinquance et atterri en prison le jour de ses 18 ans.
« J’y ai fait de mauvaises rencontres », se souvient-il. A sa sortie, il commet quelques coups, dont l’un des plus mémorables est l’attaque « explosive » d’une armurerie à Liège. « Je suis retourné une deuxième fois en prison. A nouveau, on m’a conseillé d’aller plus loin ». Une fois libéré, le Liégeois passe à la vitesse supérieure : ce sera le grand banditisme, via un braquage à main armée. Il prend huit ans. Le début de l’enfer, penseront certains. Pour lui, ce sera le début de la rédemption.
Briser ses chaînes… derrière les barreaux
Après quelques mois d’incarcération, l’ex-braqueur tombe malade. Mais contre toute attente, il décide d’abandonner les médicaments pour une alimentation plus équilibrée, plus saine. « J’ai lu un livre de diététique, qui m’a beaucoup interpellé. J’ai alors commencé à essayer de manger sainement en prison. C’était évidemment très compliqué. Pour Noël, par exemple, je me faisais livrer un colis d’aliments naturels. »
Dans le même temps, le détenu s’initie au yoga, « le seul sport praticable dans une pièce de la taille d’une cellule ». Et parce que ses voisins de galère ont tué sous l’emprise de l’alcool, il décide de ne plus en consommer. Dans la foulée, il lâche la cigarette.
Quand on veut bien faire les choses, on le fait complètement.
Mais le moment clé de son parcours tient surtout à une citation du Dalaï Lama, sur laquelle il tombe incidemment : « Sème un acte, tu récolteras une habitude ; sème une habitude, tu récolteras un caractère ; sème un caractère, tu récolteras une destinée ». Daniel Gramme prend cette maxime au mot. Mais avant de semer un acte, il réalise qu’il y a d’abord lieu de modifier ses pensées. Il commence à écrire des phrases positives qu’il se répète chaque jour, pour bien s’en imprégner. Et ses efforts paient : peu à peu, il devient u homme nouveau, libéré de la haine, et porté par de grands projets. « Pour moi, la prison a surtout été une école de la liberté ».
Un entraînement de chaque instant
Pendant trois ans, Daniel Gramme s’astreint à une discipline de fer : il contrôle ses pensées (positives), s’entraîne physiquement (avec le Yoga), étudie la diététique via ses lectures. Par l’intermédiaire du psychiatre de la prison, il parvient même à publier des articles sur son expérience de l’alimentation et de la santé.
Peu à peu, ses nouvelles habitudes transformes sa vie : il se fait des amis parmi les gardiens de prison, et parvient à dissuader des détenus, une bande de « durs à cuire » de s’évader. « Je suis devenu intime avec ces hors-la-loi. Tous partageaient la même souffrance : le manque d’amour. Cette carence mène inévitablement à la catastrophe. Aujourd’hui, mes compagnons de galère sont soit décédés soit encore en prison. Le malheur peut grandir une personne, mais il peut aussi la détruire ».
La vie après la prison
A 33 ans, Daniel Gramme quite l’établissement pénitentiaire où il a passé 8 ans… en pleine santé ! Fort d’une énergie nouvelle, il suis une formation de deux ans en naturopathie à Paris sous la houlette de Robert Masson (l’un des plus grand spécialistes de médecine naturelle), puis il décroche un diplôme en herboristerie. Il a été l’un des premiers Belges à l’obtenir. Une vrai victoire, témoignant de sa rage de vivre, de réussir, d’être heureux.
Dans la foulée, il ouvre un magasin de miel et de tisanes, rue du Papillon . Une adresse rêvée pour prendre son envol, ou devenir soi-même un papillon… Même si les débuts furent souvent durs… « Dans les années 70, s’intéresser à l’alimentation naturelle relevait de la science-fiction. J’ai parfois été moqué, voire combattu… ». Mais il en fallait plus pour ébranler celui pour qui manger bio était devenu un acte civique. « C’est un peu comme si on votait chaque jour pour un monde meilleur », murmure-t-il.
Le cercle vertueux.
Un peu plus tard, Daniel Gramme rencontre Anne-Marie, qui lui donnera trois enfants. Il donne des conférences dans le quartier, élargit sa clientèle, et écrit même un ouvrage autobiographique, « De l’ombre au soleil ». Mais c’est surtout dans la rue Morchamps, via sa Boutique Santé, fondée en 1981, qu’il trouve sa vraie voie. « J’ai choisi un quartier difficile pour établir mon commerce, et ce n’est pas un hasard. J’ai le sentiment d’y être un point d’acupuncture permettant d’y faire circuler les bonnes énergies… »
Aujourd’hui, s’il cède son commerce à son beau-fils, Daniel Gramme est toujours présent sur les lieux plusieurs heures par jour. Rien de tel que le terrain pour dispenser ses meilleurs conseils : le lait de jument, bourgeon de figuier ou argile en poudre, à chacun sa formule !
Thérapeute, herboriste, et iridologue, le Liégeois reçoit également en consultation. Il est par ailleurs conférencier et écrivain. Cinq ouvrages ont aujourd’hui été signés de sa main : « De l’ombre au soleil », « un Gramme de bon sens au service de votre santé », « le régime crétois », « Centenaire, pourquoi pas » et « Petits récits de comptoir d’un herboriste ». Autant d’ouvrages inspirants qui , à l’instar de ce personnage hors du commun, donne envie de se prendre en main, de se surpasser, et surtout… d’aimer !
Virginie Stassen – Bio Info
La Boutique Santé
En 1981, Daniel Gramme entend parler d’un magasin de miel à remettre, rue Papillon, à Seraing. C’est là qu’il va prendre véritablement son envol. Il est gérant autonome et n’est payé qu’à la commission. Il ne gagne pas grand-chose mais décide de développer le magasin pour en faire un magasin bio. Il rachète le fonds de commerce grâce à des amis qui lui prêtent de l’argent. Aucune banque n’avait accepté de financer son projet. Petit à petit, il rend l’argent à ses amis. Le magasin devient trop exigu et Daniel Gramme décide d’emménager un peu plus bas dans la rue. Quelques années plus tard, Daniel et sa femme Anne-Marie s’installe Rue Morchamps. Cela fait désormais 20 ans que la Boutique Santé accueille ses clients dans une ambiance familiale. Chaque client est accueilli comme un ami.
Un magasin qui ne désemplit pas dans un quartier plutôt défavorisé. Ce succès reste une énigme pour les professionnels en marketing. Mais cette réussite s’explique par ce personnage qu’est Daniel Gramme. Il est toujours présent pour prodiguer ses conseils. Il consulte ceux qui le désirent. On sent qu’il est vraiment passionné par son travail. Daniel est en perpétuel quête de savoir. Quotidiennement, il lit des revues médicales, consulte les sites santé, savoure des livres… Il a été l’un des premiers herboristes diplômés de Belgique. Il s’est formé auprès des plus grands. Sa passion prend tellement de place dans sa vie que son mariage n’a pas pu subsister. Le divorce aurait pu signifier la fin de la boutique il y a trois ans. Heureusement, deux personnes lui prêtent 50 000 euros chacun.
Le magasin compte aujourd’hui environ 8000 articles. On y trouve des produits inédits comme l’huile de requin. L’alimentation bio reste le cheval de bataille. On trouve également des compléments alimentaires, des cosmétiques bio, des articles de gemmothérapie, d’herboristerie… Le magasin organise régulièrement des conférences sur divers sujets. Pour des raisons de santé, son beau-fils Hieu a repris les rennes du magasin mais Daniel est en permanence au magasin.